Vous vous interrogez sur ce qu’est le Pacte pour un enseignement d’excellence ? Vous vous demandez si le Tronc commun est une nouvelle espèce d’arbre ? Quel est l’avenir de l’enseignement en Belgique francophone et pourquoi une énième nouvelle réforme ? Cet article répond à vos questions !
En 2014, la Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB) a lancé un grand projet : le Pacte pour un Enseignement d’excellence. Après de nombreuses consultations avec les acteurs de terrain (éducateurs, enseignants, directeurs), les syndicats et des représentants des familles, le Pacte a vu le jour.
Deux ans plus tard, la FWB a demandé aux écoles de créer un Plan de pilotage, un document permettant d’identifier les difficultés des équipes éducatives et des élèves et de les aider à trouver des solutions. Les premières mesures du Pacte ont été mises en place en septembre 2017.
Ce Pacte comprend un ensemble de réformes touchant tous les aspects de l’enseignement : le contenu des programmes, l’organisation des cours, la formation des enseignants, etc. De la maternelle à la fin du secondaire, l’objectif principal est d’améliorer les résultats des élèves de la FWB et de réduire les inégalités.
Le Tronc commun est l’une des réformes clés du Pacte. L’idée est que tous les élèves, peu importe l’école qu’ils fréquentent, apprennent les mêmes contenus. Il a été mis en place à la rentrée scolaire 2020-2021 dans l’enseignement maternel. Jusqu’en 2028-2029, un niveau de classe sera intégré chaque année, la 3e secondaire étant le dernier. Vous trouverez ici une présentation du Tronc commun en vidéo.
"Grâce aux nouveaux référentiels, les écoles primaires sont tenues de suivre le programme fixé dans ces référentiels : ce qui garantit le suivi de ce programme en cas de changement d’école. D’après Dan Van Raemdonck (linguiste, professeur de linguistique à l’ULB et rédacteur des référentiels de français), ce référentiel, comme les autres d’ailleurs, a été rédigé dans ce sens."
"Jusqu’à présent, les écoles n’étaient pas toutes équivalentes : pour une même discipline, les établissements pouvaient mettre la barre plus ou moins haut. Une uniformisation des contenus disciplinaires et des moments auxquels les apprendre n’est pas donc inintéressant. Nous ne devrions plus connaître le cas d’un nouvel élève qui arrive dans notre classe et qui n’a pas vu tel ou tel point de matière indispensable pour notre cours."
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La société change et l’école doit préparer les citoyens de demain aux défis qui seront les leurs. Pour cela, le Tronc commun vise à :
Il encourage les équipes éducatives à mettre en place un suivi plus précis des élèves en difficulté, pour identifier rapidement leurs faiblesses et, de manière générale, mieux gérer l’hétérogénéité des classes.
"On ne peut pas nier le fait que depuis l’arrivée du Pacte, on doit se tenir à jour des circulaires qui paraissent. D’un autre côté, on ne peut pas se lancer dans une réforme d’une si grande ampleur sans modifier les règles qui régissent l’organisation des écoles. Le calendrier était très serré. Pendant la crise COVID, le ministère s’occupait de gérer la crise et ne pouvait donc pas avancer sur le chantier du Pacte. J’ai accueilli l’arrivée du Pacte avec de l’impatience mêlée à du questionnement.
Le chantier avait l’air colossal et ne ressemblait pas à de petites réformettes comme on en avait déjà connu. Ils avaient déjà annoncé travailler sur un dossier d’élève qui circulerait entre les écoles (à mon sens c’était une bonne chose), ils avaient aussi annoncé travailler sur de nouveaux référentiels (c’était une bonne chose aussi, ils avaient dit qu’ils seraient plus complets que les Socles).
J’étais impatient de voir ces deux nouveaux outils. Le questionnement se situait plutôt sur le calendrier et la manière dont le travail serait mené. Je me posais des questions sur la quantité de travail administratif que tout cela allait nous demander. Du travail nous attendait, c’était clair, mais, pour ma part, tout s’est toujours fait en équipe, le travail paraissait moins lourd."
"Hum… Comment vous l’avouer ? J’ai vu l’arrivée du Tronc commun de loin, comme beaucoup de mes collègues. Avec une mise en pratique dans l’enseignement secondaire à la rentrée 2026, cela me semblait plus que lointain ! Ce n’est donc que très récemment que je me suis penchée sur le sujet, d’abord intéressée par les impacts et changements que ce Tronc commun occasionnerait dans mon cours de latin.
Au fil de mes lectures, j’ai essayé de prendre de la hauteur et de voir comment les différentes pièces du puzzle s'emboîtaient (les contenus disciplinaires, le suivi des élèves, le co-enseignement, etc.). Maintenant que je suis mieux informée, je n’ai plus de craintes. On est tout-à-fait capables d’affronter cette nouvelle réforme !"
Huit domaines d’apprentissage font leur apparition (de la 1ère année primaire à la 3e année secondaire) dans les programmes :
Les domaines 6, 7 et 8 ne sont pas directement inclus dans la grille horaire des élèves, mais représentent des compétences transversales à développer au travers des cinq premiers domaines d’apprentissage. À l’éducation culturelle et artistique s’ajoute le Parcours d’éducation culturelle et artistique (PECA), qui concerne tous les élèves de la maternelle à la 3e année secondaire.
Le premier référentiel à être sorti est celui des compétences initiales. Il s’agit de l’ensemble des compétences et des attendus à atteindre pour les élèves de maternelle. Les référentiels disciplinaires ont suivi et couvrent les 9 années de scolarité couverte par le Tronc commun (de la 1ère primaire à la 3e secondaire). Ils disent quand et quoi apprendre.
Les référentiels ont tous la même structure et ont été réfléchis de manière spiralaire : chaque notion à enseigner ou compétence à travailler est vue “chaque année”, de manière de plus en plus profonde en fonction des années. Vous trouverez ici une présentation de mise en œuvre des référentiels en vidéo.
Au fur et à mesure de la mise en place de cette réforme, des programmes disciplinaires interréseaux ont été publiés pour préciser les développements pédagogiques de ces attendus. Les programmes expliquent comment mettre en œuvre ces référentiels. Chaque programme suit une structure identique : une introduction, des repères méthodologiques, et des exemples de séquences de cours. Ils offrent des outils pratiques pour atteindre les savoirs, savoir-faire et compétences explicités dans les référentiels.
Les six domaines mis en place de la 1ère primaire à la 3e secondaire comptabilisent un total de 9 référentiels :
Le Tronc commun encourage aussi un décloisonnement des apprentissages : des activités interdisciplinaires sont proposées, pour que les enseignants et enseignantes puissent travailler avec leurs élèves de manière plus intégrée.
Pour aider toute personne désirant naviguer dans les différents référentiels, la RTBF a créé l’Exploreur, un outil de recherche en ligne.
"Personnellement, je suis entré (avec mes élèves) dans le tronc commun en août 2023. Concernant ma vie de classe, l’organisation n’a pas changé. Ce qui a surtout changé, c’est ma programmation. Elle est beaucoup plus facile à élaborer. Je sais exactement ce que je dois voir. On peut dire “au revoir” à l'ambiguïté des compétences du Socle de compétences."
"Le programme pour ma discipline est actuellement en cours de rédaction, mais la lecture du référentiel ne m’a pas fait peur : j’y ai retrouvé beaucoup de choses que je faisais déjà. Le programme, en cadrant le “quand apprendre”, m’aidera à être plus organisée dans la découverte des apprentissages et à penser davantage de manière spiralaire."
Le Tronc commun veut réduire les inégalités et diminuer le taux d’échec scolaire avec une approche anticipative et adaptative. En se basant sur l’observation, combinée à des évaluations diagnostiques et formatives, il propose un suivi plus précis de chaque élève. En connaissant les forces et les faiblesses de ses élèves, on peut adapter ses pratiques, faire de la différenciation pédagogique et didactique et proposer de la remédiation, de la consolidation, ou des activités de dépassement.
Pour un encadrement des élèves plus collégial, les nouvelles grilles horaires incluent deux périodes d'accompagnement personnalisé (AP) par semaine : 4 périodes hebdomadaires en 1ère et 2ème années primaires. Les Pouvoirs organisateurs ont la liberté d’organiser ces heures au mieux.
Le Tronc commun n’impose pas un schéma pédagogique, mais préconise par exemple la pratique du co-enseignement (deux intervenants pour une classe ou trois pour deux classes). Ces heures d’AP ne doivent pas être utilisées pour réduire de manière permanente la taille des classes ou créer des groupes de niveau fixes. Si un élève doit être pris en charge en dehors de ces heures, aucun nouveau contenu d’apprentissage ne peut être enseigné avec le groupe-classe. Les pratiques d’AP et de différenciation choisies par l’école doivent figurer dans le plan de pilotage et être communiquées aux parents dès le début de l’année.
Un suivi des élèves ayant des difficultés d’apprentissage persistantes est mis en place grâce au Dossier d’accompagnement de l’élève (DAccE). Ce dossier compile les coordonnées des parents et de l’enfant, les informations sur son parcours scolaire, en mettant l’accent sur ses forces et ses faiblesses.
Accessible uniquement à l’équipe éducative, aux parents et aux intervenants du Centre psycho médico-sociaux (CPMS) et du pôle territorial si besoin, il permet de mettre en place des soutiens personnalisés et complémentaires à ce qui a déjà été mis en place en classe.
Le DAccE, sans points ni remarques disciplinaires, se concentre sur les observations de l’équipe éducative et les besoins de l’élève. Communiqué trois fois par an, il sert de base pour dialoguer avec les parents et prendre des mesures concrètes pour soutenir l’élève dans ses apprentissages. En cas de changement d’école, le DAccE suit l’élève, son format numérique facilitant le travail des équipes éducatives.
"J’ai découvert le DAccE avec une rediffusion d’un webinaire sur l’utilisation de la plateforme. Au moment du premier encodage, le principal problème vécu par mes collègues et moi-même a été l’accès à la plateforme. Une fois sur la plateforme, l’encodage de bilan de synthèse n’a rien de “chinois” : ce sont des menus déroulants à sélectionner. Pour le moment, seuls les élèves en difficulté doivent être suivi avec un DAccE, pour ces élèves quelques minutes suffisent pour encoder ce bilan de synthèse."
Le Tronc commun conserve beaucoup de pratiques pédagogiques actuelles, mais les rend officielles. Par exemple, le décloisonnement des apprentissages et les projets interdisciplinaires ne sont pas nouveaux. Bon nombre d’enseignants mettent déjà en place de tels projets. Si une bonne coordination est impérative, cette volonté du Tronc commun peut engendrer de belles rencontres, tant pédagogiques qu’humaines.
Le DaccE, un outil numérique, nécessitera certes une prise en main mais ne devrait pas entraîner de grands bouleversements. Il fusionne des dossiers existants, comme le dossier administratif de l’élève avec le Plan individualisé d’apprentissage (PIA), déjà mis en place pour les élèves en difficulté. Cela facilitera le travail de l’équipe éducative et améliorera la communication entre les différents acteurs, tout en servant de base pour dialoguer avec les parents.
La différenciation en classe n’est pas nouvelle et était déjà recommandée dans le Décret Mission de 1997. Le Tronc commun vise à concrétiser ces pratiques pour obtenir des résultats exploitables pour suivre l’évolution de l’élève et améliorer son parcours. Les équipes éducatives doivent bien réfléchir à cette mise en place pour éviter que les enseignants ne soient vite débordés et renoncent, découragés. La formation des enseignants est aussi cruciale pour garantir des pratiques efficaces.
Les évaluations diagnostiques et formatives suscitent également quelques craintes. Les enseignants doivent trouver des moyens pour obtenir des informations concrètes et objectives, sans être submergés par des corrections supplémentaires. Mettre en place de nouvelles pratiques pédagogiques (ou en renforcer la fréquence pour les enseignants déjà aguerris), en parallèle des nouveaux programmes peut sembler titanesque. Mais il ne faut pas oublier que Rome ne s’est pas construite en un jour !
La visée polytechnique du Tronc commun est louable, mais soulève des questions. Les écoles sont-elles équipées pour les nouveaux cours de FMTTN et d’ECA ? La FWB dispose-t-elle de fonds suffisants pour aider les écoles ? Avons-nous assez d’enseignants qualifiés sur le terrain, surtout en cette période de pénurie ? Cette question en amène une autre...
De nombreuses écoles peinent déjà à trouver des remplaçants en cas d’absence d’un enseignant. Les périodes d’accompagnement personnalisé seront-elles affectées par cette pénurie ? Les intervenants des CPMS et des pôles territoriaux sont-ils en nombre suffisant pour que le système soit efficace ? Enfin, le Parcours d'éducation culturelle et artistique (PECA) pourrait générer des coûts pour les écoles et les parents. Si tel était le cas, qui financera ?
Le Tronc commun soulève donc plusieurs questions... Cependant, les enseignants et enseignantes ont toujours montré une grande résilience.
Cette réforme prendra certainement du temps à se mettre en place efficacement, mais avec des équipes pédagogiques bien préparées et un leadership fort des directions, tout est possible. Plus que jamais, l’Union fait la force !
Pour être très concret, l’arrivée de ce Tronc Commun ne chamboule pas notre vie de classe : évidemment, il y a des changements, mais on ne va pas se mentir, nous faisions déjà beaucoup. Surtout, ne nous démotivons pas. Ce document est préparé pour démystifier le Tronc commun et l’arrivée des référentiels.
Les référentiels permettent de fixer ce qui doit être vu et surtout quand cela doit être vu. Vous aurez donc un argument de poids quand votre collègue vous demandera pourquoi vous n'avez pas vu telle ou telle notion.
Le réel point d’intérêt pour nous est qu’il aide grandement les enseignants débutants. C’est un outil indispensable dans l’élaboration de votre programmation annuelle : vous savez ce que vous devez voir pendant l’année scolaire.
Attention, les référentiels sont assez chargés. N’hésitez pas à commencer par les croisements (activités pluridisciplinaires qui travaillent des attendus dans différents domaines).
Comment organiser son année ?
Justine Henry, professeure de latin et de grec et formatrice depuis 2013 et Diego Nardone, instituteur au primaire depuis 2016
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